L’Instance équité et réconciliation IER

Université MOHAMED V – AGDAL
Faculté Des Sciences Juridiques

Economiques et Sociales
Droit public

Mémoire de licence en Sciences Politiques sous le thème:
L’Instance équité et réconciliation IER
Instance Equité et Réconciliation

Dirigé par :
Professeur. Abdeslam BEKKALI

Préparé par :
Mlle A. Souad Mlle E. Awatif

Année Universitaire :
2004-2005

Table des matières

Plan

Première partie : Le contexte objectif de la création de l’Instance équité et réconciliation
Section I- les répressions et les dépassements des droits de l’homme au Maroc de 1956 à 1999
Section II- les revendications de la société civile pour tourner le page des années de plomb.
Section III- les efforts de l’Etat marocain dans le cadre des droits de l’homme : le processus institutionnel.
Deuxième partie : l’instance de l’équité et la réconciliation comme institution des droits de l’homme
section I : Le cadre philosophique de l’instance
section II : Le cadre fonctionnel de l’IER
section III : Les activités de l’IER
section IV :  Les contres-coups à propos de l’IER

Introduction

L’un des phénomènes les plus importants de notre époque moderne, et en l’occurrence depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, c’est le regain d’intérêt porté à la notion des droits de l’homme.

A travers d’innombrables crises et luttes continues pour la défense des droits de l’homme et la dignité de l’être humain, une prise de conscience de la dimension universelle et égalitaire du concept des droits de l’homme.

S’affirme lentement et marque profondément la pensée et l’action dans les domaines politiques et juridiques.

En effet malgré les guerres et les horreurs du siècle passé et le début de ce siècle, le pessimisme ne se justifie guère, la bataille pour les droits de l’homme se mène et la valeur suprême des droits de l’homme se dessine progressivement.

Sans prétendre exhaustif on pourrait définir les droits de l’homme comme étant ; « la formule éthique minimale sur laquelle on peut obtenir un consensus général en tout cas en théorie ».(1)

1 -Thomas Gil ; la diversité culturelle et la rationalité des droits de l’homme in droits fondamentaux et spécifiés culturelles, ouvrage collectif- texte recueillis et présentés par Henri Pallard et stomations Tzizis, édition l’Harmattan. 1997 page 147.

Cette notion originelle de droits de l’homme est essentielle au débat politique et moral moderne, mais pose en même temps d’innombrables problèmes.

Affrontant l’injustice sous toutes ses formes, s’opposant à l’oppression et aux différentes sortes d’inégalité d’ordre social racial, culturel, moral ou politique, faisant prévaloir la primauté de l’homme et de ses droits naturels, fondamentaux et sacrés face à l’arbitraire et aux excès des autorités et des institutions qu’il a d’ailleurs lui même contribué à établir la dynamique des droits de l’homme réapparaît au grand jour à l’heure actuelle.

Pour contrecarrer la montée de la dictature de l’absolutisme et surtout illustrer cette prise de conscience aiguë et sérieuse des exigences de protection et de promotion des droits de l’homme que la communauté des Etats défend et prend à son compte principalement après les événements inhumains atroces et barbares consécutifs à la 2éme guerre mondiale.

Les droits de l’homme ne sont donc analysables que par les descriptions exhaustives de leur nature et de leur contenu, associés à une interprétation héroïque, philosophique ainsi que les définitions religieuses qui sous tendent ce concept très controversé.

L’Islam consacre la dignité de l’homme créé par Dieu, le Coran et la Sunna définissent et consacrent en termes claires la liberté et l’égalité de l’individu, ce qui consacre la grandeur de l’Islam entant que système parfait de protection des droits de l’homme et code de la vie religieuse et sociale traitant les croyances, la moralité et les rapports humains sous tous leurs aspects, c’est surtout la priorité absolue accordée à la prééminence de la vie de l’être humain, ainsi que l’intégrité corporelle et la dimension intellectuelle de la raison humaine.

S’agissant maintenant plus particulièrement de la définition juridique des droits de l’homme, on peut relever qu’il n’y pas de critère juridique explicite permettant de cerner les contours de ces droits, on peut seulement dire que ces droits sont ceux qui doivent permettre l’épanouissement de la personnalité de chaque individu et assurer la dignité de la personne humaine au sein de la société.

Cette double signification désigne d’abord un possessif des droits que l’homme possède, qui lui sont « inhérents » naturels et qui recouvrent pour le moins les droits afférents au corps et à la pensée de la personne.

Mais ils désignent également un relatif des droits extérieurs aux éléments constitutifs de la personne ainsi que tous les aspects de son existence pouvant sembler indispensables si non vitales.

Cette suprématie des droits de l’homme implique une certaine conception des rapports entre l’individu et l’Etat trouve ses limites dans les droits fondamentaux reconnus aux individus, ce qui crée ainsi la possibilité d’une opposition au pouvoir fondée sur le droit, mais elle a par finalité la garantie des droits fondamentaux des citoyens.

Cette affirmation de la primauté de l’individu dans l’organisation sociale, économique et politique présuppose une double exigence : l’instrumentalisation de l’Etat dont le but est de servir les libertés et la subjectivisation du droit qui dote chacun d’un statut et le dote d’une capacité d’action autonome.

La finalité de toute organisation sociale est donc la sauvegarde de ces droits naturels et les lois positives ne sont que le moyen de la protection solennelle de ces droits.

Cette idée de droits subjectifs opposables au pouvoir constitue la clé de voûte de la conception moderne de l’Etat de droit, elle implique que les individus bénéficient d’un ensemble de droits et de libertés constituant des garanties contre le pouvoir, et suivant que ces droits seront plus ou moins étendus, l’Etat de droits se développe ou s’affaiblit.

Néanmoins, eut égard du développement actuel des droits de l’homme cette armature de l’Etat de droit apparaît comme un processus contradictoire, instable et souvent inachevé.

En dépit de la grande importance que revêt sur le plan pratique la notion de droit de l’homme, certaines conditions les plus fondamentales inhérentes à leur substance et à leur effectivité demeurent sans réponse et dénuées d’une concrétisation réelle.

Nous pouvons prendre pour hypothèse exacte par définition, que les droits de l’homme sont les droits que tous les individus possèdent tout simplement par leur nature humaine, certains de ces droits ont- ils un caractère absolu, ou peuvent- ils subir des entorses dans des circonstances déterminées ?

Certes, les droits de l’homme varient dans le temps et dans l’espace, il sont fortement tributaires des contextes historiques et géographiques, et dépendent aussi de l’environnement national, régional et international, la tendance à l’absorption de la personne par le pouvoir et à occulter les droits et libertés de l’individu ne connaît pas partout la même ampleur.

« Dans l’étape historique actuelle, les Etats du tiers monde doivent assembler leur forces pour sortir du sous développement, améliorer les conditions matérielles d’existence et les amener à un niveau où les droits ne seront pas purement formels, une incompatibilité organique n’existe- elle pas entre la défense des droits de l’homme et la guerre déclarée au sous développement ? les démocraties occidentales admettent bien elle même que lorsque le statut de la nation est en cause, les libertés puissent être restreintes, suspendues, certaines supprimées»(1).

Les conflits entre conceptions idéaux idéologiques sont les éléments constitutifs des divergences opposant l’individu au pouvoir.

La recherche d’une identité propre en matière des droits de l’homme fut la première difficulté des garanties accordées à l’individu n’étaient pas de nature à favoriser l’émergence d’un espace de convergence entre spécificité nationale et universalité des droits de l’homme.

Mais peut-on concevoir un Etat développé, une société civile évoluée et épanouie, des réformes politiques et institutionnelles adéquates et répondant au déficit démocratique profondément ressenti sans l’existence d’une sphère où se déploient les libertés et les droits reconnus à la personne humaine et qui est garantie contre les incursions et les atteintes du pouvoir.

Une nouvelle configuration mondiale des droits de l’homme fortement une hétérogène a vu le jour dès le début du 20éme siècle avec l’apparition de la conception marxiste réfutant les principes fondamentaux de la société libérale et essentiellement adoptée par l’ex URSS, les pays de l’Europe de l’Est et quelque autres pays d’Amérique latine, d’Asie et d’Afrique, Chine populaire, Vietnam, Cuba, Algérie….

Cette situation est devenue profondément critiquée avec les violations répétées et systématiques des droits de l’homme et les graves atteintes à la vie et à la dignité humaine que connaissent les pays du tiers monde, on reste confondu de constater que les droits fondamentaux les plus élémentaires sont transgressés quotidiennement partout dans le monde.

Il faut cependant remarquer que de façon générale les pays en développement se sont dotés d’institutions représentatives transcendées par des constitutions calquées sur les pays d’occident développés dans un cadre apparemment démocratique

Par la destinée des droits et libertés, il y a eu ceci et par ailleurs une grande inquiétude, celle de ces constats comme conditionnés par le pouvoir et dépendent de lui, car non seulement il s’arroge l’organisation des garanties des droits en édictant des règles qu’ ils fixent, mais la réglementation régissant les libertés et les droits demeure délibérément éparse et incomplète.

L’insuffisance des garanties internes de l’exercice des droits tient donc pour une large part à l’absence et/ ou aux déficiences de la norme juridique, soulever ces lacunes montrerait impérieusement la partie la plus visible mais pas nécessairement la plus décisive du problème de la confiscation implicite des droits par l’Etat oppresseur.

Mais « en fait l’expression révèle que les techniques juridiques et la loi elle même peuvent vider les droits de l’homme, aussi bien qu’elles peuvent les servir » ( )

Il importe autant d’observer l’usage que le pouvoir fait des garanties en les détournant à son avantage et au détriment des individus.

On prétendait certes que « le pouvoir arrête le pouvoir » célébré aphorisme qui pour Montesquieu, ne traduit qu’une constatation relative aux institutions anglaises de son époque, une réflexion devenue une sorte de dogme institutionnalisé à travers la consécration du principe constitutionnel de la séparation des pouvoirs comme une garantie des droits de l’homme.

Or, des institutions et des mécanismes internes indifférents à la notion de démocratisation et de protection des droits individuels concourant à la précarité des garanties qui apparaissent peu efficaces et aléatoires.

Les techniques et les procédures ne sont pas rentes, ils expriment des conceptions différentes et des interprétations divergentes de la théorie des droits de l’homme.

De manière générale la problématique des droits et libertés fondamentales dans les pays du tiers monde ne peut être examinée que par rapport à l’Etat.

Le sous développement et les nécessités de croissance entrainent-ils un effacement des droits de l’homme, ou doivent-ils garantir leurs reconnaissances ?

Plusieurs facteurs d’ordre économique politique et culturel peuvent être avancés pour expliquer ce déficit notaire ressenti dans le domaine de droit de l’homme dans les pays en voie de développement

« En dépit de la volonté manifestée ça et là par les Etats africains de suivre des voies respectant les principes démocratiques, les droits de l’homme et les lois fondamentales tels qu’ ils sont proclamés dans la charte des Nations Unies et surtout dans la déclaration universelle de 1948, il n’en reste pas moins que dans la pratique de chaque jour, ces droits de l’homme demeurent systématiquement violés et bafoués ou par le moins non respectés et ignorés » ( ).

Faut-il rappeler la société civile à l’urgence d’une volonté ferme et constante et d’un effort concret pour l’effectivité des quelques garanties que le pouvoir lui concède pour l’extension et la consolidation de ses droits.

Enseigner ces droits, analyser leurs contenu, montrer leur limite, exposer leur statut, est le premier devoir non seulement des Etats, des ONG, des universités et des universitaires, mais aussi des instances nationales de protection des droits et libertés.

Au Maroc l’idée d’un mode spécifique de garantie des droits est apparue au début des années 90 avec la création du CCDH.

Sans nul doute, l’état de développement des droits fondamentaux conjugués à d’autres facteurs politiques ayant marqué cette période, explique t-elle en bonne partie cette initiation institutionnelle, contextuelle tendant à donner un contenu concret aux exigences internes et externes de protection et de promotion des droits et libertés.

C’est précisément parce que les débats ne sont pas clos que les expériences ne sont pas généralement considérées comme clusentes, parce que les techniques sont perfectibles, parce qu’en fin la signification sociale et institutionnelle de la notion de promotion des droits fondamentaux ne ressort avec netteté, qu’il serait d’une excessive prétention de vouloir tirer des conclusions définitives ou tenter un essai d’évaluation des politiques adoptées en matière des droits de l’homme, au Maroc et en l’occurrence la concrétisation organisationnelle des objectifs tracés dans le cadre et assignés au CCDH.

La situation des droits civils et politiques au Maroc a évalué favorablement durant la dernière décennie, cette évaluation a été le résultat de plusieurs facteurs dont notamment la conjoncture internationale et l’action conjuguée des organisations non gouvernementales dans le monde et sur le plan national.

La volonté politique du Roi défint s’est concrétisée par nombre de mesures favorables et plus particulièrement l’amnistie de juillet 1994, l’ébauche de règlement du dossier de la disparition forcée et l’élargissent substantiel des libertés individuelles et collectives.

En interaction avec cette ouverture, la société civile s’est développée et a accru son action dans différents domaines socio- économique, culturel et politique.

Cependant le maintien de la politique «du tout sécuritaire», les dysfonctionnements graves de l’administration et les déficiences de la justice n’ont pas permis un changement substantiel dans la nature des rapports entre l’Etat et la société.

L’accession au trône du Roi Mohamed VI, l’expression claire de sa volonté de tourner la page du passé et les premières mesures qu’il a initié dans ce sens ont suscité un grand espoir.

Ceci étant, une amélioration décisive et irréversible de ces droits demeure tributaire du règlement global et équitable du dossier de la disparition forcée, de l’abandon du concept répressif de l’autorité, de la promotion des droits sociaux élémentaires et de la consolidation des fondements de l’Etat de droit.

Ces fondements sont un parlement issu d’élections libres et honnêtes, des garanties juridiques et de pratiques suffisantes pour la jouissance des libertés fondamentales et une justice impartiale le et efficiente.

A l’orée du 3éme millénaire, la concrétisation de la réforme de l’Etat est une condition indispensable à la stabilité, au succès de la transition et au développement .

En général, l’année 2003 s’est caractérisée par une dynamique particulière dans le domaine des droits de l’homme, cette dynamique a puisé des principes fondamentaux et son impulsion dans la haute instruction royale énoncée dans le discours du trône, dans le discours de commémoration de l’anniversaire de la révolution du roi et du peuple et dans les discours d’inauguration de la deuxième année législative de la 7éme législature du parlement le 10 octobre 2003.

Les discours du souverain expriment l’engagement solennel du Roi en faveur de la consolidation des bases de la démocratie et de l’enracinement de la culture de la citoyenneté, des droits de l’homme et de l’égalité et incarnent les aspirations légitimes du peuple marocain à s’engager sur la voie de la réforme et du progrès soutenu.

Dans ce contexte le Roi a approuvé le projet de recommandations adoptées par le conseil le 13 octobre 2003 sur la base de l’article 7 du dahir le réorganisant pour le création d’une commission ad-hoc appelée « instance équité et réconciliation »

Cette instance sera chargée du règlement extra-judiciaire équitable pour clore le dossier des violations passées des droits de l’homme et réaliser la réconciliation afin d’envisager l’avenir à la lumière des enseignements tirées de la période où des violations des droits de l’homme ont eu lieu.

Cette instance fait partie de nombreuses initiatives audacieuses et judicieuses visant à la fois à remédier aux séquelles des violations passées des droits de l’homme et par conséquent à créer un climat favorable à la consolidation de l’Etat de droit et consolider l’édification institutionnelle.

L’IER a été installée le 7 janvier 2004, elle constitue un mécanisme non juridique dont l’objectif est de parvenir à la vérité, l’équité et la réconciliation sans évoquer une quelconque responsabilité individuelle

Dès lors, l’entrée en scène de ce nouvel acteur dans le champs politique marocain soulève toute une série de question, cette instance est – elle le signe avant coureur d’un changement dans la culture politique du pays, ou bien augure-t-elle seulement de l’éveil de la société civile marocaine ?

Pourrait- elle réellement contribuer à assoire durablement l’Etat droit au Maroc ?

Ainsi nous examinerons les deux axes fondamentaux de cette étude, à savoir :

  • La première partie : l’appréhension du contexte objectif dans lequel a été créée l’instance d’équité et réconciliation.
  • La deuxième partie : Réflexion sur cette instance comme institution contribuant à la promotion et la protection des droits de l’homme au Maroc.

2 –Philipe Aradant, droit constitutionnel et droits de l’homme, ouvrage collectif édité par l’association française des constitutionalistes, Editions Economica – 1998, p : 118-119.
3 -Jean Rivero : Les libertés publiques; Tome I, Les droits de l’homme. Edition PUF, 1992. Page 127.
4 -Ahmed Belhaji Sendague lesans- développement et les droit de l’homme, édition : BABEL, 1994. p : 46

 

Pour citer ce mémoire (mémoire de master, thèse, PFE,...) :
📌 La première page du mémoire (avec le fichier pdf) - Thème 📜:
Instance Equité et Réconciliation
Université 🏫: Université MOHAMED V - AGDAL - Faculté Des Sciences Juridique
Auteur·trice·s 🎓:
Mlle A. Souad Mlle E. Awatif

Mlle A. Souad Mlle E. Awatif
Année de soutenance 📅: Economiques et Sociales - 2004-2005
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